Afin de mieux informer les acquéreurs d’un terrain constructible et prévenir les risques liés à la nature du sol lors de la construction, le législateur, au travers des articles L.112-20 et suivants du Code de la Construction et de l’Habitation (CCH), impose désormais la transmission d’études géotechniques par le vendeur à son acquéreur, dès lors que plusieurs conditions sont remplies.
Le contenu de ces études, les techniques particulières de construction ainsi que la délimitation des zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols argile, ont été précisés par trois arrêtés du 22 juillet 2020, publiés au Journal officiel le 6 août, le 9 août et le 15 août 2020, et modifiés depuis par deux arrêtés du 24 septembre 2020, publiés au Journal officiel le 30 septembre 2020.
QUEL EST LE BUT RECHERCHÉ PAR LE LÉGISLATEUR?
Les terrains argileux peuvent voir leur volume varier à la suite d’une modification de leur teneur en eau, en lien avec les conditions météorologiques. Ces terrains se rétractent lors des périodes de sécheresse (phénomène de « retrait ») et gonflent au retour des pluies lorsqu’ils sont de nouveau hydratés (phénomène de « gonflement ») : on parle dès lors de phénomène de retrait-gonflement des sols argileux. Ces variations peuvent atteindre une amplitude assez importante et endommager les bâtiments localisés sur ces terrains. Le phénomène de retrait-gonflement des argiles engendre chaque année des dégâts considérables, indemnisables au titre des catastrophes naturelles. Les sinistres concernent principalement les maisons individuelles. Les mouvements de terrain induits par le retrait et le gonflement des argiles se traduisent principale- ment par des fissurations en façade des habitations.
À titre d’illustration, au cours de l’été 2018, près de 5 200 communes ont demandé que leurs sinistres soient reconnus par l’état en tant que catastrophe naturelle du fait du retrait-gonflement des argiles, ce qui représente plusieurs dizaines de milliers d’habitations sinistrées. Le coût moyen d’indemnisation d’un sinistre consécutif au phénomène de retrait-gonflement des argiles s’élève à 16 700 € : il s’agit de l’un des coûts les plus élevés des garanties dommages. En application de l’article 68 de la loi ELAN du 23 novembre 2018, le décret du conseil d’État du 22 mai 2019 a créé une section du CCH spé- cifiquement consacrée à la prévention des risques de mouvements de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols. L’objectif de cette mesure législative est de réduire le nombre de sinistres liés à ce phénomène en imposant la réalisation d’études de sol préalablement à la construction dans les zones exposées au retrait-gonflement d’argile.
Les études géotechniques prescrites par la loi ELAN doivent permettre de déterminer avec exactitude la nature du terrain destiné à la future construction, afin d’adapter au mieux les caractéristiques du bâti aux contraintes géologiques locales.
QUEL EST LE CONTENU DES ÉTUDES GÉOTECHNIQUES ?
Deux études géotechniques sont visées par la loi ELAN, l’une en cas de vente de terrains non bâtis constructibles, la seconde préalablement à la conclusion d’un certain nombre de contrats dans le cadre d’opérations de construction de bâtiments (principalement les contrats de construction de maison individuelle), à savoir :
- La première, appelée « étude géotechnique préalable » (G1) procède à une première identification des risques géotechniques d’un site et à la définition des principes généraux de construction, permettant de prévenir le risque lié au retrait-gonflement. La durée de validité est de 30 ans à condition qu’aucun remanie- ment du sol ne soit intervenu depuis.
Ladite étude devra obligatoirement être annexée à tout avant-contrat ou à défaut d’avant-contrat, à l’acte authentique de vente. Cette étude restera annexée au titre de propriété du terrain et suivra toutes ses mutations.
- La seconde, appelée « géotechnique de conception » (G2) tient compte de l’implantation et des caractéristiques du bâtiment à construire et n’est valable que pour le projet de construction en vue duquel elle a été réalisée. Elle a pour but de fixer, sur la base d’une identification des risques géotechniques du site d’implantation, les prescriptions constructives adaptées à la nature du sol et au projet de construction, afin, là encore, de prévenir le risque de retrait-gonflement, de façon plus circonstanciée.
DANS QUELS CAS LE VENDEUR DOIT-IL FOURNIR L’ÉTUDE G1?
Le vendeur d’un terrain à bâtir est désormais tenu de fournir à son acquéreur, une étude géotechnique préalable (G1), dès lors que le terrain est situé dans une zone moyennement ou fortement exposée au phénomène dit de retrait-gonflement des sols argile et que ce même terrain est susceptible de recevoir une mai- son individuelle. Le coût moyen de l’établissement de l’étude géotechnique préalable s’élève à 1 010 € TTC (selon enquête réalisée par le Pôle Habitat FFB auprès de ses adhérents).
- La loi ne fait aucune distinction quant à la qualité du vendeur, de sorte que cette nouvelle obligation s’impose aussi bien à un professionnel qu’à un simple particulier.
- La carte faisant apparaître les zones à risque est disponible sur le site Géorisques (http://www.georisques. gouv.fr/). Seule la vente d’un terrain à bâtir dans une zone d’exposition forte ou moyenne est concernée. A contrario, le vendeur n’est pas tenu de fournir cette étude en cas de vente si le terrain vendu est situé dans une zone d’exposition faible.
- Cette étude G1 doit être annexée à tout avant- contrat de vente conclu à compter du 1er octobre 2020 et à défaut d’avant-contrat à tout acte de vente conclu à compter de cette même date. En revanche, aucune obligation de fournir ladite étude n’est imposée au vendeur ayant conclu avec son acquéreur un avant-contrat avant le 1er octobre 2020, sauf si ce dernier s’y était engagé aux termes dudit avant-contrat.
- Par exception à cette obligation, le vendeur n’a aucune obligation de fournir l’étude G1 lorsque le terrain non-bâti est destiné à la construction, dans des secteurs où les dispositions d’urbanisme applicables ne permettent pas la réalisation de maisons individuelles. À s’en tenir à la lettre du texte, il importe peu de se focaliser sur la destination envisagée de la construction, seule compte la potentialité de pouvoir édifier une maison individuelle au regard du droit de l’urbanisme.
QUELLES SONT LES SANCTIONS ENCOURUES À DÉFAUT D’ÉTUDE G1?
À défaut de fournir l’étude géotechnique préalable à l’acquéreur, le vendeur pourra être sanctionné sur les fondements du manquement au devoir d’information, sur le terrain des vices du consentement ou encore sur celui de l’obligation de délivrance. Autrement dit, ce dernier pourra être tenu de verser des dommages et intérêts à son acquéreur et le contrat de vente pourra être annulé par décision de justice.
Cette obligation persiste et ce même si l’acquéreur est en possession de l’étude géotechnique de conception (G2). En effet, « les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure le devoir d’information » (C. Civ art. 1112-1). Conseil du notaire : Notons que s’il est impossible pour le vendeur de s’exonérer de son obligation légale de fournir ladite étude, il est tout à fait envisageable de prévoir conventionnellement que le coût de l’étude géotechnique préalable soit pris en charge intégrale- ment par l’acquéreur ou à frais communs, et ce en vertu de l’article 1608 du Code civil. Tout repose alors sur la négociation préalable entre les parties.»